Le consentement et la notion de choix dans le monde numérique

Le consentement et la notion de choix dans le monde numérique

Auteur : Clara Le Gros - Date de publication : juillet 19, 2017

[chapo]Précédemment nous avons vu que l’utilisation de données personnelles pose de nombreux problèmes. Ceux-ci peuvent être d’ordre juridique d’une part et d’ordre philosophique de l’autre. Nous pouvons se demander où placer la limite entre le partage de nos informations et le respect de nos libertés fondamentales ? Ce consensus semble difficilement atteignable. Cependant il est important de réfléchir à ces problématiques avant qu’un retour en arrière ne soit plus possible.[/chapo]

Consentement et compréhension

La notion de consentement est donc, dans le monde des données informatiques, omniprésente. Il semble essentiel de s’en préoccuper pour éviter les écueils présents et futurs. Sans compter qu’il s’agit d’une obligation juridique : nous devons systématiquement accepter des termes et conditions lorsque nous consultons un site (qui génère des cookies). Il en va de même lorsque l’on s’inscrit à un nouveau service. Néanmoins le consentement ne signifie pas la compréhension de l’utilisateur. Par exemple, dans certains cas, ce sont les entrées et les sorties d’un algorithme de prédiction qui ne se sont pas renseignées. Avec ces situations de plus en plus fréquentes, que l’on soit ingénieur informatique ou non, on ne peut pas deviner sans indications tous les aboutissants d’un algorithme. Algorithme qui peut aller à l’encontre de nos libertés.

Mais alors, comment se fait-il que la plupart des utilisateurs n’accordent pas d’importance à l’utilisation de leurs données ? Il est difficile de répondre à cette interrogation fascinante puisque nous ne pourrons jamais deviner ce que pensent l’ensemble des utilisateurs individuellement. Cependant nous pouvons nous interroger ensemble sur la question.

Pauvreté de choix, une plaie ou une aide ?

Les algorithmes et l’utilisation de nos données peuvent s’opposer à la notion de libre-arbitre. Prenons un exemple concret : En nous proposant uniquement des solutions d’achats liées à nos traces numériques, nous laisse-t-on vraiment le choix ? Supposons que j’ai acheté toute la collection de La Pléiade, ne puis-je pas surprendre mon site d’achat en ligne en achetant la dernière œuvre en date de Nabilla même s’il ne me l’a pas proposé ? La réponse est évidemment oui. Cela est possible mais uniquement parce qu’il y a eu une volonté de ma part. Je savais que je voulais ce livre sinon je ne l’aurais jamais découvert. Et c’est ainsi que l’on peut passer à côté de belles trouvailles et ne jamais, comme on le dit dans le monde du conseil, changer de « scope ».

Mais est-ce un mal de ne pas avoir beaucoup de choix ? Après tout, le but affiché des algorithmes est l’amélioration et la simplification de nos vies. Cela se traduit souvent par un gain de temps dans nos activités (les GPS, par exemple) ou des découvertes de nouveautés (services musicaux). Dans le cas des découvertes musicales, les suggestions se basent sur les écoutes précédentes et celles des utilisateurs qui nous ressemblent. Peut-on vraiment parler de découverte en son sens premier ? Si je passe mon temps à écouter Katy Perry, on ne me proposera jamais d’écouter du Rachmaninov.

Un choix de facilité 

On peut toutefois se demander si chacun souhaite un véritable libre-arbitre ? Après tout, le déterminisme des algorithmes fournit un certain apaisement. Un confort qui nous permet même, si l’on se réfère à la pensée utilitariste, d’atteindre le bonheur et le plaisir. Pensée qui peut choquer lorsque l’on pense qu’il ne s’agit pas là d’une finalité noble pour nos vies il est vrai !

Il appartient donc à chacun de se faire un avis sur la question pour éviter, très schématiquement, un problème comme celui que l’on peut rencontrer dans les transports en commun entre ceux qui souhaitent ouvrir la fenêtre et ceux qui souhaitent la fermer.

Pour résumer….

Il faut donc proposer un cadre commun qui imposerait certaines règles et limites, que ce soit au niveau de l’entreprise, français, européen ou mondial. Si la question de l’utilisation des données personnelles est aujourd’hui au cœur des conversations, avec notamment l’arrivée du Règlement Européen sur la Protection des Données, n’oublions pas que plus que l’autorisation d’utilisation, il faut s’intéresser aux finalités des projets qui les utilisent. Et cela non seulement à une échelle juridique mais aussi philosophique.

Clara LE GROS – Publié le 19 Juillet 2017